Dans notre monde ultra-connecté, l’intelligence artificielle semble être l’apogée de l’évolution des nouvelles technologies. Et pourtant, elle nous terrifie autant qu’elle nous fascine.
Pinocchio, la plus célèbre marionnette du monde, est très certainement la première représentation d’IA créée au cinéma (Pinocchio de Giulio Antamoro, 1911). Si nous avons été touché par l’histoire de Gepetto, qui, ne pouvant pas avoir d’enfant, avait sculpté un petit garçon dans une bûche de bois; c’est sûrement parce qu’on avait oublié que le jour où ledit pantin commencerait à ressentir des émotions, ce serait sans nul doute la fin de toute une époque.
Émotions et IA
Dans cette interview de Ridley Scott donnée au HuffPost, le réalisateur partage totalement ce point de vue. Le film de science-fiction (mais pas que!) 2001, L’Odyssée de l’espace, tourné par Stanley Kubrick de 1965 à 1967, parle d’une IA qui devient dangereuse lorsqu’elle commence à éprouver des sentiments et qu’elle décide de ne plus écouter les humains.
Si une IA découvre les émotions, ON EST FOUTUS!
Ridley Scott
Certains scientifiques comme le professeur Stanislas Dehaene, assurent que dans un futur proche, des robots pourront, en plus de leur intelligence, être dotés d’une conscience artificielle et faire preuve de sensibilité. C’est aussi l’idée qui traverse aussi Ridley Scott quand il créé son Blade Runner dans les années 80.
Les dangers potentiels de l’intelligence artificielle.
De nombreux films se concentrent sur les impacts négatifs de l’intelligence artificielle et sur les risques que l’on encourt à se frotter à elle. Visiblement au cinéma, l’IA fait davantage peur qu’elle n’inspire confiance. Des films comme 2001, L’Odyssée de l’espace, Terminator ou encore Matrix, nous présentent un concept d’IA où la machine domine et contrôle l’humanité pour le pire. Dans Matrix justement, la question du libre arbitre de l’agent Smith est claire: est-ce qu’il va réussir à se libérer des chaînes de sa « mère artificielle »?
Et comme tous les robots ne sont pas aussi attachants que l’adorable Wall-E, le pape François a jugé opportun en novembre 2020 d’inviter ses fidèles à prier pour que les progrès de la robotique et de l’intelligence artificielle « soient humains ».
Un robot autonome
Cela pose naturellement la question des intentions d’un robot capable de devenir autonome, de faire ses propres choix et de se reprogrammer tout seul.
Persuadé « que l’on finit souvent par devenir esclave de ses propres inventions », Elon Musk s’alarme lui aussi. L’intelligence des robots dépassera bientôt celle des hommes et ils n’auront plus besoin de nous pour prendre des décisions.
Dans une interview donnée à Forbes en 2019, il déclare:
Nous nous dirigeons rapidement vers une super-intelligence digitale qui dépasse de loin toute intelligence humaine. Le taux d’amélioration de l’IA est beaucoup plus élevé que celui attendu et le danger réel de l’IA sera davantage à propos des humains entre eux qu’à propos de l’IA contre nous.
Elon Musk pour Forbes magazine
Chez les hommes, pas de touche reset pour réinitialiser le cerveau, autant de controverses qui nous font oublier qu’heureusement, nous n’avons pas encore fait le tour du cerveau humain. Comme nous le rappelle Christof Koch, directeur scientifique et président de l’institut Allen pour les sciences du cerveau à Seattle:
Cet organe d’à peine 1 kilo et demi à la texture comparable au tofu, est de loin le morceau de matière active organisée le plus complexe de l’univers.
Christof Koch
Le robot écrivain
Christof Koch part du principe qu’un jour, un robot sera très certainement capable d’écrire un bon best-seller. Si elle suit la progression vertigineuse des logiciels de traduction que nous avons connu dans le passé et qui ont fait des progrès renversants grâce au Deep learning, cette prophétie devrait s’accomplir dans un futur proche.
Les algorithmes sauront-ils un jour écrire un chef-d’œuvre aussi abouti qu’À la recherche du temps perdu, de Marcel Proust ? Difficile à dire, mais les prémices sont là.
Christof Koch (pour le Hors-série n°115 Pour la Science)
Dans un entretien qu’il a accordé au quotidien « Time magazine » en octobre 2017, Kazuo Ishiguro, prix Nobel de littérature, se dit touché par l’idée que les écrivains risquent bientôt d’être remplacés par des robots.
« Ce n’est pas seulement que l’IA produirait un livre que l’on ne distinguerait pas d’une œuvre de Ian McEwan. Je pense profondément que cela produirait un nouveau type de littérature, comme le modernisme a pu transformer le roman. Parce que l’IA voit les choses différemment.
Kazuo Ishiguro
Les Frères Grimm reviennent à la vie
Le collectif d’auteurs Botnik, a développé une intelligence artificielle pour écrire des histoires originales. Ainsi, ils décident de rendre la parole aux Frères Grimm 150 ans après leur mort, en créant un conte de fée saugrenu intitulé « La Princesse et le Renard. »
Sur le papier l’idée est excellente, mais le résultat est loin d’être convaincant. Donc, no stress, les écrivains n’ont pas à craindre, demain, d’être dépossédés de leur art. 😅
Définition de l’intelligence artificielle
Fondée en 1950, selon le Larousse, L’intelligence artificielle (IA) est définie comme « l’ensemble des théories et des techniques mises en œuvre en vue de réaliser des machines capables de simuler l’intelligence humaine ».
L’intelligence artificielle a cette capacité d’interagir avec l’homme mais aussi avec de nombreux autres objets dont on a nourri sa mémoire. Si on entre dans l’IA une quantité astronomique d’informations, de data, elle progresse organiquement, à la manière de l’homme qui verra ses compétences et ses qualités se décupler lorsqu’il accélèrera ses interactions avec d’autres individus connectés à son domaine d’activité.
Machine learning et Deep learning
Les ordinateurs, les programmes et les logiciels d’intelligence artificielle sont basés sur le Machine learning (ou apprentissage automatique) et sur le Deep learning (ou apprentissage profond).
Le Machine learning permet à la machine de se perfectionner toute seule par le seul fait de lui donner un accès à la data. Quant au Deep learning, il est un dérivé du Machine learning et repose sur le shéma artificiel du traitement de l’information neuronale du cerveau humain.
Or la matière grise d’un mammifère contient entre 100 millions et 100 milliards de neurones en fonction de l’espèce. C’est dire s’il faut que nos ordinateurs soient puissants et performants pour être capables de s’approcher des capacités du cerveau humain.
« Bien sûr qu’il faut aimer l’IA ! Après tout, qu’est-ce que l’opposé de l’intelligence artificielle ? La stupidité naturelle ».
Harry Shum, Executive Vice-President AI & research/Microsoft
Premier exploit de l’IA
Le 10 février 1996: premier exploit de l’intelligence artificielle sur l’intelligence humaine. L’ordinateur Deep Blue met son adversaire Garry Kasparov échec et mat en 37 coups.
C’est une grande victoire pour l’IA, une victoire qui va même se prolonger puisque vingt ans plus tard, en 2017, AlphaGo (développé par Google) gagne le numéro 1 mondial au jeu de Go.
Prouesse d’autant plus spectaculaire que ce jeu, vieux de plus de 2500 ans, est d’une imprévisibilité et d’une complexité stratégique, stratosphérique. 🤣
L’arrivée de l’ordinateur quantique
L’apparition d’un ordinateur qui défierait les lois de la physique classique fait rêver. Une machine qui serait capable de faire des calculs jusqu’à 100 millions de fois plus puissants, une machine qui traiterait des données de manière simultanée (et plus seulement de manière binaire), et qui pourrait amener l’IA à dépasser le plafond de verre de ses champs d’application!
Si en 2029 Google prévoit de lancer son premier ordinateur quantique, nous pouvons donc aisément nous projeter et imaginer que dans un futur proche, l’IA se verra dotée de super-pouvoirs tels que ceux de ressentir de l’empathie ou de développer un instinct de survie.
Les bienfaits de l’intelligence artificielle
Il y a deux ans, j’ai découvert la société canadienne Hitlab qui travaille avec une intelligence artificielle qui permet de découvrir des talents émergents dans le domaine de la musique. Au début je me suis vraiment posé la question du bien-fondé de cette technologie. Je me disais qu’un robot sans émotion ne pourrait jamais percevoir la sensibilité artistique d’un musicien et que cela risquerait également de standardiser la production musicale.
Et puis j’ai essayé le logiciel sur mes amis artistes et j’ai compris que ce système pouvait révolutionner la carrière des jeunes talents. Si un label manager peut écouter une dizaine d’artistes par jour, en revanche, l’IA peut analyser, elle, jusqu’à 100 000 chansons à l’heure!
Alors je me suis investie pour développer cette intelligence en France et je vois jour après jour qu’elle peut aider de nombreux artistes à décoller. Je crois qu’il ne faut pas avoir peur des avancées technologiques car elles sont souvent à l’origine des grandes révolutions.
Des objets ultra connectés
Luc Julia, spécialiste français de l’intelligence artificielle et co-créateur du système de reconnaissance vocale Siri, dans son livre L’Intelligence artificielle n’existe pas, nous prouve que la machine ne sera jamais un prédateur pour l’homme.
Par ailleurs, l’idée même que les robots, une fois dotés d’intelligence, auraient alors une volonté de domination est absurde. Les gens les plus intelligents ne sont pas forcément ceux qui ont le plus soif de pouvoir, il suffit pour s’en convaincre de regarder certains leaders de la planète ! Depuis la nuit des temps, le désir de dominer est bien plus lié à la testostérone qu’à l’intelligence.
Luc Julia, Éditions First, 2019
Les développeurs d’intelligence artificielle nous font miroiter une vie plus facile grâce à la présence exponentielle d’ objets connectés dans notre quotidien. Nous entrons dans une ère où l’homme ne laisse plus rien au jeu du hasard.
Moi, en fait, ce genre de vie ne me fait pas rêver. Les nouvelles technologies me rendent souvent fainéante et quelque part, me poussent même à la dépression à cause de l’oisiveté qu’elles génèrent.
Lorsque l’on se bat pour réussir un projet, il prend une tout autre valeur. La question cruciale est: si l’IA nous permet de gagner plusieurs heures de liberté par jour, alors comment emploierions-nous ce temps libre? Deviendrions-nous plus créatif? Plus efficace? Est-ce que nous nous tournerions davantage vers les autres? 😆
Lorsque l’IA devient notre alliée
Au final, l’intelligence artificielle fait peur parce qu’on pense tout de suite qu’elle pourrait se retourner contre nous. À l’instar de l’homme qui a toujours imaginé qu’il pourrait se passer de Dieu, nous projetons que le robot créé à notre image fera un jour de même et qu’il nous rejettera lui aussi.
Mais cette idée est absurde. Pourquoi serions-nous incompatibles? Si les humains et les animaux peuvent vivre ensemble depuis la nuit des temps, alors pourquoi les robots et les hommes ne pourraient-ils pas en faire autant?
C’est une analyse profonde. On y mesure tous les enjeux de l’IA. Je regrette un peu l’absence du film IA qui s’est vu passer des mains de Kubrick à celles de Spielberg…
L’article est éclairant sur ce qu’on nomme Intelligence. Ces êtres qu’on englobe dans l’IA seront sûrement plus véloces, plus rapides que nous et pourront certainement être plus stratèges mais c’est sur ce point où se situera l’erreur, une erreur toute humaine qui consiste à céder aux sentiments et aux instincts, celui de la prédation que décrit si bien Howard Bloom.
Merci pour cet article de haut niveau, très inspirant mais n’oublie pas le plaisir de fictions écrites et en images.
YL
Merci cher Yvan pour ce retour encourageant 🙂 Je vais de ce pas visionner AI de Spielberg, j’ai entendu qu’il avait tout de même récupéré 80 pages du scénario original de Kubrick! Édifiant…